Cahiers de la Profession : « les architectes demandent la mise en place urgente d’une politique cohérente de l’habiter… dès le 1er m2 ! »

Cahiers de la Profession n°40 – page Débats – par Thierry VAN DE WYNGAERT Conseiller national de l’Ordre :

Faisons court : depuis quelques mois circule une pétition de confrères demandant au ministre de la Culture la suppression du seuil de 170 m2 à partir duquel la loi impose de faire appel à un architecte. A l’époque où règne une volonté de dérégulation particulièrement affligeante, la question est-elle de demander l’aide du ciel ou bien d’encourager l’architecture dès la construction du premier mètre carré ?
Les avis sont partagés, et c’est la raison pour laquelle le Conseil national appelle les architectes à se mobiliser pour réclamer une politique cohérente de l’habitat, car là est réellement le sujet qui doit tous nous préoccuper. Il faut donc continuer ce débat et aboutir.
Notre siècle est confronté au défi de l’accroissement de la population, à la nécessité de la loger dignement, d’organiser ses lieux de travail et de limiter son temps de déplacement. A ce titre, les architectes sont concernés, car les 30 années à venir risquent de ne pas être très glorieuses, si l’on ne prend pas suffisamment en compte les conséquences de cette évolution en termes d’étalement urbain, d’enjeux environnementaux, de lutte contre le changement climatique, de préservation de notre cohésion sociale.
Suivant le premier article de la loi de 1977 sur l’architecture, rappelons que « la création architecturale, la qualité des constructions, leur insertion harmonieuse dans le milieu environnant, le respect des paysages naturels ou urbains ainsi que du patrimoine sont d’intérêt public. » Sans oublier la suite de cet article précieux qui précise que «les autorités habilitées à délivrer le permis de construire ainsi que les autorisations de lotir doivent s’assurer, au cours de l’instruction des demandes, du respect de l’intérêt public. » Demander la suppression de cette loi n’est peut- être pas une priorité…
Par contre, les architectes doivent demander la mise en place, rapidement, d’une politique cohérente du logement et de l’habiter pour notre pays, basée sur le renforcement de l’intercommunalité dans l’instruction des autorisations d’aménager afin de ménager le territoire et de favoriser le mieux vivre ensemble.
Car la question des prochaines années est-elle de revoir la loi de 77 pour avoir des maisons d’architectes dans des lotissements bien clôturés, bien gardés, bien sécurisés et bien accessibles en voiture, ou bien de reposer sans cesse la question de l’étalement de la médiocrité que permettent les autorisations de construire justifiées par la fausse urgence de la durée d’un mandat communal ? L’intérêt local ne peut pas suffire s’il ne prend pas en compte l’intérêt général : il doit donner envie de vivre dans un monde équitable et partagé. Il passera d’avantage par la mise en place d’un urbanisme négocié entre les citoyens, au sein d’un espace de débat à inventer, que par l’arbitraire municipal d’un urbanisme réglementaire et régalien qu’accompagne parfois, tel autrefois le fou du roi, un architecte qui se veut démiurge.
Est-ce absurde de faire simple et clair :

  • Notre territoire est fragile, ménageons-le !
  • L’échelon de l’agglomération est le plus approprié pour avoir une vision cohérente de sa capacité à accueillir les générations futures. Si on était d’accord sur cette base, on pourrait passer à la question suivante : on fait comment ?

Aujourd’hui, les architectes sont accompagnateurs de projets auprès des élus, forces de propositions dans les études urbaines, porteurs d’enthousiasmes et de désirs dans le développement des villes, tout en étant concepteurs et constructeurs. Leur niveau de savoir-faire leur permet d’organiser au moindre coût l’ensemble des contraintes techniques, environnementales et réglementaires, tout en offrant des garanties de responsabilité et d’assurance. Le recours à un architecte n’est pas une contrainte supplémentaire, mais le moyen de protéger le consommateur et d’assurer sa sécurité.
Quel que soit le seuil, ils peuvent intervenir, dès aujourd’hui, dès le premier m2 !
Faisons de l’habiter un enjeu majeur de notre société !

 

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